Lorsque ma kiné m'a suggérée que je souffrais de fibromyalgie en janvier 2021, je suis allée voir sur Internet comment je pouvais faire pour avoir un diagnostic... C'est à ce moment-là que je me suis rendu compte que ce n'était pas aussi facile que de faire un test PCR !
En effet, il est impossible de diagnostiquer la fibromyalgie de façon simple et rapide. Ce syndrome n'apparaît ni dans une prise de sang, ni aux radios, ni aux IRM et il n'existe pas de test dédié comme pour la covid-19, par exemple.
Et là, c'est le drame ! Je trouve beaucoup de sites qui me parlent de questionnaires, d'examen clinique, mais aucun ne répond vraiment à ma question : "qui dois-je aller voir être diagnostiquée ?".
Les différents questionnaires d'auto-évaluation
Ne trouvant pas réponse à ma question, j'ai décidé de faire tous les questionnaires d'auto-évaluation que j'ai pu trouver, en attendant d'avoir un rendez-vous avec mon médecin traitant. Il existe aussi des questionnaires à destination des médecins que je ne développerais pas ici. Si vous voulez les connaître, je vous invite à vous rendre sur le site de l'association Fibromyalgie SOS : Diagnostic & évaluation ou à lire en détail le rapport de l'expertise collective de l'INSERM.
Le questionnaire d’impact de la fibromyalgie (QIF)
Le QIF a été développé au Canada par l’équipe des Drs Burckhardt, Clark et Bennett). Il a été publié dans le Journal de rhumatologie canadien en 1991. La version française, que vous retrouverez ici, a été validée par l'Académie de Médecine française en 2007.
Ce dernier est composé de 20 questions qui mettent en avant l'impact de vos symptômes sur votre vie quotidienne (retentissement sur le travail, anxiété et dépression, troubles du sommeil, de la digestion...). Pour moi, c'est le premier questionnaire que vous devez remplir si vous suspectez une fibromyalgie. Il vous permettra d'échanger pour la première fois avec votre médecin pour lui faire comprendre plus facilement ce que vous vivez. Il permet de mettre en avant facilement votre état de santé et son évolution.
Le questionnaire Fi.R.S.T.
Le questionnaire le plus souvent recommandé est le Fibromyalgia Rapid Screening Tool (Fi.R.S.T., pour les intimes).
Cet auto-questionnaire est simple, rapide, bien adapté au dépistage de la fibromyalgie en pratique clinique courante.
Rapport complet sur la fibromyalgie, Inserm, 2016
Il est très facile à remplir comme vous ne répondez que par "oui" ou "non" à 6 questions sur la douleur :
mes douleurs sont localisées partout dans tout mon corps (oui ✔️)
mes douleurs s'accompagnent d'une fatigue générale permanente (oui ✔️)
mes douleurs sont comme des brûlures, des décharges électriques ou des crampes (oui ✔️)
mes douleurs s'accompagnent d'autres sensations anormales, comme des fourmillements, des picotements ou des sensations d'engourdissements dans tout le corps (oui ✔️)
mes douleurs s'accompagnent d'autres problèmes de santé comme des problèmes digestifs, des problèmes urinaires, des maux de tête ou des impatiences dans les jambes (oui ✔️)
mes douleurs ont un retentissement important dans ma vie : en particulier, sur mon sommeil, ma capacité à me concentrer avec une impression de fonctionner au ralenti (oui ✔️)
Si vous avez répondu "oui" à au moins 5 de ces questions, il y a de très fortes chances que vous souffriez de fibromyalgie.
Questionnaire de Brest 2010
Pour la prise en charge de leurs patients souffrant de douleurs chroniques, le CHU de Brest a développé un questionnaire assez complet. Même s'il n'est pas spécialement dédié à la fibromyalgie, il permet de se rendre compte de la multiplicité de nos symptômes et de leurs impacts physiques, psychologiques et sociaux.
La recherche des symptômes
Dans mon article Les 1001 symptômes de la fibromyalgie, je vous présentais les différents troubles causés par la fibromyalgie. Le diagnostic de la fibromyalgie repose en premier lieu sur l'examen clinique, c'est-à-dire sur la recherche de ces symptômes. L'Inserm dans son rapport collectif sur la fibromyalgie souligne qu'il est important de rechercher justement cette mixité de symptômes et non de se baser uniquement sur la douleur chronique.
Je me suis donc rendue dans un premier temps chez mon médecin traitant. Elle était bien embêtée elle aussi. Elle ne connaît que très mal le syndrome et ne peut faire l'examen clinique elle-même. Elle n'est pas vraiment capable non plus de répondre à ma question "du coup, je vais voir qui ?". Elle m'adresse alors à un collègue spécialiste dans la médecine physique et de réadaptation, le Dr Pasquet.
Je me rends alors compte que malgré le fait qu'elle soit assez jeune (elle a fini ses études en 2016), la fibromyalgie n'est pas vraiment abordée dans les cursus universitaires. En fouinant sur les différents sites des facultés de médecine française, je me suis rendu compte que peu d'entre elles proposaient le diplôme inter-universitaire (DIU) prise en charge de la douleur. Par exemple, celui de l'université de la Sorbonne accorde 2 h sur tout le programme à la fibromyalgie... Pour ceux qui ne connaissent pas le système universitaire, les DIU (comme les DU) sont des diplômes à passer en plus du cursus classique (et donc payant).
Aujourd’hui, moins de 20 heures de cours sont officiellement consacrées à la douleur aiguë et chronique dans les formations médicales françaises, et dans les instituts de formation en soins infirmiers, de kinésithérapie, ou de psychologie. La part d’enseignement consacrée à la fibromyalgie au sein de ces cours sur la douleur est souvent inexistante.
Rapport complet sur la fibromyalgie, Inserm, 2016
L'examen clinique
Il consiste en la recherche d'une douleur diffuse (c'est-à-dire) sur l'ensemble du corps et chronique (qui durent depuis plus de 3 mois). Dans mon cas, cela faisait 24 mois, on était large ! J'ai donc réalisé ce premier examen clinique avec le Dr Pasquet en février 2021.
Pour pouvoir rechercher l'ensemble des douleurs, les médecins suivent les critères de diagnostic, établis par l’American College of Rheumatology en 1990, avec notamment les 18 points de Yunus. Pour confirmer le diagnostic de fibromyalgie 11 de ces 18 points doivent être sensibles à la pression d'un doigt.
Cet examen est complété par un examen neurologique, des questions sur les troubles digestifs, ainsi que le retentissement sur la vie de tous les jours et une possible dépression (Comme l'a dit le Dr Pasquet "Retentissement sur le moral +++". "Anxiété +").
Une fois l'examen fini, il m'a fait passé le questionnaire Fi.R.S.T. pour valider sa suspicion de fibro (j'avais eu 5/6 à l'époque).
À la fin de l'entretien, il m'oriente (et me recommande) vers la clinique de la Sagesse et sa structure de lutte contre la douleur chronique rebelle, pour un avis complémentaire. Il me conseille aussi fortement de continuer la kiné et une prise en charge par un psychologue.
La structure de lutte contre la « douleur chronique rebelle » de la Clinique Mutualiste La Sagesse
J'ai donc été convoquée à la structure de lutte contre la « douleur chronique rebelle », le 4 mai 2021, par le Dr Le Picard qui est aujourd'hui mon algologue (= médecin spécialisé dans la douleur). Le rendez-vous s'est d'abord composé d'un long entretien pour connaître mes antécédents, mon mode de vie (famille, couple, travail...) et l'histoire du problème pour laquelle je suis venue. On a ensuite discuté des douleurs, de leurs fréquences et de leurs localisations. Nous avons aussi abordé le sujet du sommeil. Pour connaître mon état de santé "morale", j'ai répondu au questionnaire de l'échelle HAD (Hospital Anxiety and Depression), que vous pouvez retrouver ici. Cela a confirmé l'impacte important de la fibromyalgie sur mon quotidien, vu que mes résultats ont été de 10 en dépression (symptomatologie douteuse) et 14 en anxiété (symptomatologie certaine). Nous sommes ensuite passées à l'examen clinique. Elle m'a alors fait passer le test des Critères WPI et SSS de l’ACR (ici) qui a définitivement validé le diagnostic de fibromyalgie.
Le diagnostic par exclusion
Une fois le diagnostic posé, le Dr m'explique qu'il faut réaliser des examens complémentaires afin de savoir s'il s'agit d'une fibromyalgie primaire ou secondaire. Dans le second cas, cela veut dire qu'elle n'est pas seule et qu'elle peut cacher une autre maladie avec des symptômes similaires comme la polyarthrite rhumatoïde, la spondylarthrite ankylosante, la sclérose en plaques, etc.
Pour cela, j'ai donc je dois donc rencontrer un rhumatologue et un neurologue et faire un bilan sanguin complet. Je rencontre aussi la psychiatre du centre au vu de mon score HAD.
Dans mon cas, tous ces examens reviennent négatifs et il est donc maintenant officiel que je souffre d'une fibromyalgie ainsi que d'un syndrome anxio-dépressif associé.
Qui peut diagnostiquer une fibromyalgie ?
Si l'on revient à la toute première question que j'ai posée, la réponse n'est finalement pas si claire. En effet, le diagnostic peut être envisagé par plusieurs spécialistes (rhumatologue, psychiatre, algologue, spécialiste dans la médecine physique et de réadaptation) mais faut-il encore qu'une personne ait le courage de le faire. Je parle de courage, car j'ai clairement ressenti ce besoin de "faire valider le diagnostic" par ses pairs. J'ai demandé à ma kiné pourquoi elle avait attendu 24 mois pour m'en parler. Elle m'a avoué qu'il s'agissait d'une peur d'avoir raison. C'est un syndrome qu'on ne souhaite à personne. Mais quand elle a vu que je continuais de venir la voir depuis aussi longtemps et que rien n'apparaissait aux examens, elle a fini par prononcer le mot tabou.
Au final, celui qui peut diagnostiquer la fibromyalgie, c'est celui qui la connaît, qui la reconnaît et qui a le courage de le faire.
Merci d'avoir pris le temps de me lire.
N'oubliez pas de partager cet article et d'en parler autour de vous. Cela pourrait aider l'un de vos proches.
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